Arizona Lounge Café

Extrait

Partie 2

C'était une nuit douce qui tombait sur le désert. Le ciel nous dévoilait sa nappe d'étoile comme pour nous narguer d'horizons plus attrayants. Je fis mon entrée dans le bar et allai m'installer sur l'élégante chaise de bar qui avait remplacé mon bon vieux tabouret en bois. Certes, on finissait par avoir mal au cul en fin de soirée, mais il me manquait tout de même. On s'attache à toutes sortes de conneries quand l'habitude finit par avoir raison de votre vie. Le whisky que je ne commandais même plus m'attendait déjà.
Ce fut au moment où je portai mon verre à ma bouche qu'une mélodie inhabituelle vint me quérir. Je ne reconnus pas la patte du vieux Joe mais c'était bien lui qui jouait une sorte de vieux jazz mélancolique accompagné d'une voix sensuelle à la Dinah Washington qui médusa le trop peu d'âmes présentes ce soir-là. Tim n'en revint pas, il avait trouvé la perle qui correspondait exactement à l'image de son lounge café tant rêvé. Il avait un aperçu mais de là à rameuter la clientèle, ce serait vraiment de l'ordre du rêve.
Une beauté latine venait apporter une touche inhabituelle dans un endroit abandonnée depuis toujours. Cette voix jaillissait d'un corps fin et élancé. Une bouche d'un rouge excessif qui rendait ses lèvres encore plus pulpeuses qu'elles ne l'étaient, des pommettes creuses faisant ressortir ses os zygomatiques genre : camée déjantée.
Une beauté qui se serait arrêté à ce moment précis où on aimerait que le temps cesse sa course. Ni trop jeune pour s'être enfin débarrassée de l'insouciance juvénile ni trop âgée pour se servir de l'expérience comme d'un rempart. Une beauté qui ne figurait pas encore dans ses favoris internet à la catégorie : « M.I.L.F ».
Une fois la prestation achevée elle alla naturellement s'installer au coin du bar à l'abri des regards. Le sien se noyait dans une coupe de champagne. Il m'était impossible de me rappeler des minutes où mon regard s'était détourné d'elle. Tout en moi, suppliait la miss latino de se remettre à chanter. Mais elle disparut en remerciant Tim.
Je ne traversais pas longtemps, ce désert frais et sec pour regagner ma maison sur la colline. En moi vibrait encore le son de sa voix. Son visage mince offrait de la tendresse à mon ivresse.